Trucs et conseils

La chance

Je ne compte plus les fois où j’ai entendu les gens d’affaires dire que la chance n’a rien à voir dans leur succès. Moi j’ai toujours trouvé cela un peu prétentieux. Dire que le succès n’est que le fruit du travail, c’est aussi s’attribuer à soi tous les mérites. Tous. Aucun crédit au timing. Pourtant, c’est bien connu : « in business, timing is everything ».

Reconnaître que la chance fait aussi partie de l’équation ne signifie pas que l’on a aucun mérite. Pas du tout. Il en est de même lorsqu’on reconnaît les rôles qu’ont joué l’équipe, les partenaires, les fournisseurs et même les créanciers dans les succès d’une entreprise. Laisser un peu de place à la chance dans son récit c’est aussi reconnaître que tout n’est pas que le fruit de votre incroyable personne. C’est d’exprimer de la gratitude pour cette partie qui ne vous appartient pas dans le succès. C’est de reconnaître que le succès c’est aussi la convergence de plusieurs facteurs dont vous faites partie. C’est comme l’alignement des planètes : cela présuppose qu’il y a plus qu’une planète dans l’alignement !

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Toutefois, faire de la place à la chance quand on parle de succès, c’est aussi se donner le crédit de l’avoir saisie ! Tout le mérite d’avoir été là, de l’avoir vue se manifester, de s’être préparé à la saisir et d’être passé à l’action. Pour moi, c’est exactement ça qu’on appelle faire sa chance. Faire sa chance c’est se préparer à son passage, c’est faire ses devoirs pour être prêt à la saisir, c’est de passer à l’action et se mettre sur son chemin pour pouvoir bien la saisir quand elle se manifeste.

Pour vous illustrer la place de la chance dans tout succès, laissez-moi vous raconter l’histoire de la photo qui accompagne ce texte.

Hier matin , j’étais sur Facebook à faire le tour des publications des gens que je suis lorsque je vois une photo spectaculaire. Une envolée de milliers d’oies blanches. J’en ai faites des semblables il y a quelques années sur le bassin de Chambly. Tellement impressionnant comme spectacle. Je remarque que la photo a été prise la veille, à Beauharnois. Je me dis que c’est possible de m’y rendre et de revenir à temps pour le souper.

Alors avant de partir, puisqu’il s’agit tout de même d’un voyage de près de 2h30 aller-retour, je me renseigne sur Google map. Je vérifie les endroits où on peut observer les oies, est-ce qu’il y a des permis à demander, des heures d’ouvertures pour des parcs etc. Je ne voudrais pas me buter à une barrière fermée ou à un permis qu’il m’aurait fallut avoir au préalable. Je vérifie aussi à quel endroit je devrais les observer en fonction de la position du soleil à l’heure où je serai sur place. Vaut-il mieux reporter pour y aller tôt le matin? Tard en fin de journée ? Je ne veux pas avoir le soleil en plein poire ! Les oies seraient mal éclairées et mes photos pas vraiment intéressantes. Du moins elles ne seraient pas conformes à ce que je veux faire comme images.

Bref, me voilà décidé. J’ai bien localisé les endroits où je peux me placer. Ensuite je prépare l’équipement. Une très longue focale, un zoom de surcroît pour la flexibilité des cadres. Je ne sais pas à quelle distance je serai des oiseaux. J’apporte aussi une deuxième lentille. Zoom encore, mais pour les grands angles. Question de saisir les images si les oies sont très près de moi. Avec un trépied parce que ma grosse lentille est tout de même lourde. Et parfois, il faut attendre un bon moment avec le sujet en cadre avant de déclencher. Et à bout de bras, ça devient lourd à la fin. Et ne pas oublier de vérifier si les cartes mémoires sont dans l’appareil, en avoir une dans sa poche arrière au cas où, avec des piles supplémentaires aussi.

Voilà, je suis presque prêt. Ne manque que de prévoir les vêtements et les chaussures. Je ne sais pas encore quel sera le terrain sur lequel je devrai poser mes pieds ni combien de temps je devrai attendre, au grand vent et sur le bord de l’eau, le moment décisif pour saisir l’image parfaite !

En quittant la maison, je remarque que je n’ai pas tout à fait une bonne charge dans les batteries de la voiture. Alors je fais un arrêt au DIX30, question d’ajouter quelques dizaines de kilomètres d’autonomie à ma voiture électrique. Une Tesla Model S que je possède depuis plus de sept ans déjà. Et je me remets sur la route.

Arrivé dans la région de Beauharnois, je cherche les oies blanches. Je roule sur les routes que j’avais identifiées, sur le bon côté du canal, celui même qui m’offrira la bonne lumière. Puis je traverse un pont-levis et les aperçois au loin. Trop loin. La lumière est encore bonne. Heureusement, à la sortie du pont, il y a un stationnement. Même que quelques photographes amateurs et autres observateurs y sont déjà installés.

Je me stationne aussi et débarque avec mon matériel au cou. Trépied, caméras, piles et cartes de rechange, chaussures étanches, je suis prêt à toute éventualité. Mais les oiseaux sont trop loin. Je peux certainement faire quelques clichés mais rien de ce que j’aurais souhaité. Alors je profite de l’occasion pour faire des photos autour. Il y a la glace brisée du fleuve qui dérive sous mes yeux, passant sous le pont-levis du vieux canal de Beauharnois. Il y a aussi ces roches dans l’eau crystalline, surplombées des carreaux mal taillés de glace qui défilent. Je m’amuse un peu.

Puis le temps passe et toujours rien. Les oies sont bien où elles sont. Leurs envolées par milliers sont trop loin de moi pour que je puisse en saisir l’énergie, ni l’émotion que l’on ressent devant un tel spectacle. J’appelle ma chérie pour lui partager ma déception et lui dire que je replie bagage. Pas de chance. Je reviendrai peut-être demain. S’il fait beau.

Alors que je m’apprête à plier bagage, je rencontre un autre photographe qui lui, arrive sur les lieux. On échange un peu et il m’informe que la veille, les oies se trouvaient juste ici, à nos pieds. Des dizaines de milliers. Il revient tout juste d’un autre endroit. Sur l’autre rive. Il y en a quelques dizaines de milliers là-bas aussi. Il m’indique le lieu mais, en constatant l’heure, je me rends compte qu’il est trop tard. Je n’aurai pas le temps de m’y rendre. Nous avons un souper zoom ce soir avec des amis. Je ne peux manquer ce rendez-vous. Je finis par me dire que ce n’est pas mon jour de chance. Ce sera pour une prochaine occasion. Puis…

Le pont-levis est levé. Ce qui signifie que je devrai attendre un peu ou faire un long détour. Les batteries de ma voiture n’étant pas complètement chargées, je choisis d’attendre plutôt que de prendre le risque de me retrouver à plat. Et j’aperçois au loin la raison de la position levée du pont : un gros bateau approche dans le canal. Il se dirige droit sur l’emplacement qu’ont choisi les oies pour se prélasser au soleil. Mais voilà une occasion peut-être parfaite qui se dessine ! Un spectacle prometteur que celui de ce navire qui viendra déranger les milliers d’oiseaux. Et si c’était la shot que je souhaitais ?

Je reviens rapidement sur place. Je sais que le moment ne durera que quelques minutes. Je sais. Je l’ai trop souvent vécu. Je vérifie les réglages de ma caméra, ceux de ma lentille. J’installe mon trépied en vitesse et je suis prêt. Puis se produit ce que j’avais anticipé : les oies s’envolent au passage du navire. Je déclenche et déclenche encore. Des dizaines de photos. Je varie les angles, les cadrages. Je sais que ce moment ne se reproduira pas après. C’est une occasion unique. Je clique et clique espérant que tous mes réglages sont les bons et que la lentille et son focus automatique feront leur travail. Ça dure moins d’une minute.

Je tripe. Littéralement fou de joie. Quelle incroyable chance me dis-je ! Puis je retourne à la voiture et, dans l’ombre de la banquette arrière je m’empresse d’allumer ma caméra pour regarder si j’ai fait de bons clichés. J’en ai plein!! Je zoom et constate que tout est beau ! Ce sera incroyable sur un grand écran.

Je prends ensuite le chemin du retour non sans partager ma chance et ma joie à ma chérie. J’appelle même un ami qui travaille avec la garde côtière pour lui raconter mon récit. Le bateau est en effet un brise-glace léger qui appartient à la garde-côtière. Le Martha L. Black. Tous deux sont bien contents de la chance que j’ai eue.

La chance. C’est effectivement elle qui s’est manifestée sous mes yeux hier. Mais, vous et moi savons que cette photo n’est pas seulement due à la chance. Nous savons que les autres photographes présents avec des lentilles trop courtes n’ont pas pu faire ces images. Ni ces autres qui n’avaient qu’un téléphone intelligent pour saisir ces images. Et que pour posséder des gros objectifs, il faut avoir pris les moyens de se les offrir, ou de payer les frais de location, ou de connaître quelqu’un d’assez gentil pour vous les prêter. Mais dans tous les cas, il fallait avoir fait des efforts au préalable. Et il fallait aussi savoir comment les utiliser. Comment bien régler sa caméra dans de telles circonstances. Il fallait aussi connaître les règles de la composition pour de belles images. Tout ça requiert aussi des efforts au préalable. Et pas seulement quelques minutes avant. Des semaines et des semaines durant. Des décennies pour ma part.

Bref, tout ce temps que j’ai mis à étudier la photographie, tous ces efforts que j’ai déployé pour me procurer le matériel requis pour faire une telle photo, tout ça n’aurait pas servi ce jour là si je ne m’étais pas aussi rendu sur place ! Parce qu’au départ, fallait être là! A cet endroit précis et à ce moment précis dans le temps. Le timing quoi.

Vous voyez ? Certains diront que j’ai eu de la chance. Et c’est vrai. J’ai eu toute une chance. Suis le premier à le reconnaître. Mais j’étais prêt à la saisir. Je l’avais anticipée. J’avais fait tout ce qu’il fallait pour que, si cette occasion se présentait à moi, je pourrais la transformer en véritable succès. J’ai fait ma chance. Ça ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de chance, ça ne veut pas dire que je n’ai aucun mérite, ça veut juste dire que j’étais prêt, que j’avais fait ce qu’il fallait pour être prêt et que je me suis mis dans l’action, dans le chemin probable de son passage et je l’ai saisie, sans hésiter quand elle s’est manifestée à moi.

La même chose en affaires. Certes il y a des entrepreneurs qui ne sont que chanceux. Ça arrive aussi dans la vie. Toutes les semaines des gens gagnent à la loterie vous savez. Comme vous et moi, nous avons déjà gagné par le simple fait d’être né ici, au Québec plutôt que dans les bidonvilles de l’Afrique du Sud par exemple. Mais la plupart des entrepreneurs qui ont du succès font leur chance. Ils se préparent, étudient les meilleurs, apprennent les méthodes, maîtrisent les techniques et surtout se mettent en action. Et pas n’importe où, ils se placent dans le chemin probable, celui où la chance pourrait se manifester et venir récompenser tous ces efforts.

Alors je vous partage cette photo où la chance est venue me sourire hier après-midi. Une chance inouïe pour une photo spectaculaire. Un moment qui ne se répète pas tous les jours, ni même tous les mois ou toutes les années. Fallait être là pour la voir et la saisir. J’ai eu cette chance. J’ai fait ma chance. Et vous ? Êtes-vous en train de préparer votre chance ou simplement de l’attendre ?

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